C'est en 1989 que Paul et Anne-Marie, fondateurs de la Communion Notre-Dame de l'Alliance avaient rencontré le Père Jacques Nourissat, lors d'un séjour qu'il effectuait en France avant de repartir au Canada et lui avaient demandé de prêcher notre retraite au Foyer de Charité de Baye en août 1990. L'année avait été marquée par le départ de Paul Salaün, ayant obtenu la non-validité de son sacrement de mariage. En arrivant à cette retraite, les frères et sœurs de la Communion se posaient beaucoup de questions, ne comprenaient pas le sens de ce départ et éprouvaient une grande blessure. Avant que n'intervienne le Père Nourissat, un canoniste de l'officialité d'Arras, le Père André Gressier nous avait entretenus sur les causes de non-validité du sacrement de mariage et les conséquences qui en découlaient, pour nous éclairer et apaiser les tensions.

pere-Nourissat1Le Père Nourissat, en mission à l'Office de la Famille de Montréal depuis de nombreuses années, était bien placé pour prendre la suite des enseignements et nous encourager dans notre choix de fidélité, tout en nous exhortant à la miséricorde pour les autres situations. Le contact s'est vite établi entre le Père Nourissat et les membres de la Communion présents à la retraite, par ses qualités d'écoute, d'accueil, de bienveillance, pour sa parole chaleureuse, et pour la façon dont il a su dédramatiser l'évènement qui avait secoué la Communion.

Il nous a donné tout de suite le ton de ses enseignements en commentant les articles 83-84 de l'exhortation apostolique "Familiaris Consortio" du Pape Jean-Paul II parue en novembre 1981. Vous êtes les "83" (personnes séparées, et divorcées non remariées) aimait-il à nous rappeler, ce qui n'excluait pas notre attitude d'accueil et de charité vis-à-vis des "84" (les fidèles divorcés remariés) dont le ministère du sacrement de mariage demeure toujours.

C'est aussi de lui que nous vient cette expression de "conjugaliser", c'est-à-dire d'entretenir le plus possible de liens avec notre conjoint séparé. Il nous a rappelé tout au long de cette retraite comment nous devions vivre la miséricorde et le pardon envers notre conjoint et comment élever nos enfants sans haine ni agressivité envers l'autre parent qui était parti. C'est vraiment réconfortée dans mon choix de vie que je suis revenue de cette retraite de Baye, en mettant en pratique ses conseils vis-à-vis de mon époux séparé pour "conjugaliser".

Le Père Nourissat a entretenu des relations avec la Communion après son retour au Canada. Il nous a fait parvenir en 1995, le livre écrit avec l'office de la famille de Montréal: PASTORALE DES FAMILLES BRISEES (un accompagnement et une mission chrétienne à proposer).

En 1997, à Rome, lors du Conseil Pontifical pour la Famille dont le thème était la Pastorale des personnes séparées, divorcées remariées, j'ai eu la grande joie de retrouver le Père Jacques Nourissat avec qui j'ai beaucoup partagé pendant ces quelques jours. Il était à mes côtés quand nous avons eu l'immense joie de la rencontre avec le pape Jean- Paul II.

La dédicace qu'il m'a faite sur son livre résume en quelques mots la force de ses convictions : À toi Bernadette et les tiens... C'est le Dieu fidèle qui nous permet de rester et de grandir dans la fidélité... au CHRIST. Jacques Nourissat + 25/01/97. Merci pour tout, Père Jacques !

Bernadette (Nantes) – PAYS DE LOIRE

Père Jacques

J’ai rencontré pour la première fois le Père Jacques au Plessis Robinson chez Babeth (modératrice à l’époque avec Bernadette Maillard) en 1994. Habitant depuis peu la région parisienne et membre du groupe de Poissy, j’avais entendu parler du Père lors de mon accueil chez Anne Marie Lemarquer début 1991 alors qu’il venait de prêcher la retraite de Baye l’été précédent.

pere-Nourissat2Nous étions quelques convives autour de Babeth et avant de déjeuner, Jacques avait célébré l’Eucharistie sur la table, rompant le pain, offrant le vin. La simplicité de cet homme, son calme et la chaleur avec laquelle il nous rapportait son expérience au Québec me surprenait. Ce n’est qu’au cours des années suivantes, qu’invité à participer à une puis à une seconde rencontre organisée par Jacques à Paris je découvris mieux « sa » pastorale et surtout compris que les divorcés fidèles n’étaient pas les seuls à être interpellés par le Christ. Nous avions à nouer avec ceux qui, pour des raisons diverses, avaient fait le choix d’une nouvelle union, des relations fraternelles, car tous enfants d’un même Père, nous devions puiser dans nos forcesbaptismales la possibilité d’accueillir l’amour infini de Dieu pour chacun tel qu’il est, là où il en est.

Ce qui m’impressionnait chez Jacques c’était, outre son sourire, sa capacité d’accueil. Aucun jugement sur la personne, sur la situation (solitude, vie maritale, nouvelle union, relation homosexuelle), sur l’état de révolte, sur les récriminations vis-à-vis de la « position de l’Eglise », mais une grande délicatesse dans l’écoute, ainsi qu’une infinie délicatesse dans l’annonce de l’exigence évangélique. Pas de contrainte à un changement radical mais une invitation à rechercher comment nous pouvions vivre en vérité afin de mieux suivre Jésus.

Etre vrai vis-à-vis de son conjoint séparé, être juste dans mes relations avec lui, que ce soit dans l’exercice de mon droit de visite des enfants ou dans celui du versement de la pension dont je lui suis redevable. Cesser de le détester (de le haïr peut-être). L’aimer ? Non, c’est impossible : « pour le moment... » disait le Père Jacques. Cette expression « pour le moment... » revenait sans cesse dans ses propos.

« N’ayez jamais peur de prier pour votre conjoint et d’espérer qu’il soit un saint » (Père Jacques au cours d’une récollection de la Communion à Ars en Mai 2003).

Il invitait nos frères divorcés remariés à faire de même vis-à-vis de leur conjoint, vis-à-vis du père, de la mère des enfants qu’ils avaient eu ensemble. Il leur apprenait à discerner la force du lien de leurunion sacramentelle.

« L’Eglise ne vous rejette pas : vous êtes, vous aussi, ses enfants bien aimés, elle vous ouvre les trésors de la miséricorde du Père. La rupture d’alliance provoquée par votre nouvelle union ne vous place pas dans la possibilité de recevoir le sacrement de l’Alliance par excellence, mais Jésus souhaite habiter toujours plus votre cœur, accueillez-le par le grand désir que vous avez de le recevoir. Le prêtrene peut vous donner le sacrement du pardon, pour le moment, car aujourd’hui vous n’êtes pas en mesure de renoncer à une vie commune peut être en raison de l’accueil de nouveaux enfants, mais le prêtre peut vous écouter, accueillir votre désir du pardon et vous encourager à entretenir une vie de prière. »

Miséricorde et Vérité les deux maîtres mots du sacerdoce exercé par le Père Jacques. Tout dans l’attitude du Père Jacques, dans les propos qu’il tenait reflétait ces deux termes.

« Père, vous suintez la Miséricorde » lui ai-je dit au cours d’une de ces rencontres parisiennes.

La Communion Notre Dame de l’Alliance allait bénéficier de son enseignement une deuxième fois au cours de notre retraite d’été 1998 à Montligeon. Bernadette et Thierry, modérateur depuis un an à l’époque, l’avaient sollicité. Il avait alors quatre-vingt-un ans. Je pense qu’il a aidé tous les participants à redécouvrir qu’ils étaient ministres de leur sacrement de mariage, mais il a aussi changé notre regard sur nos frères divorcés remariés. Car pour un certain nombre d’entre nous ce frère, cette sœur, c’est peut être notre conjoint.

Après son retour définitif en France, en 1998, le Père Jacques est revenu vivre à Dijon, son diocèse d’origine. Pendant quelques années il exerce un ministère d’assistance dans l’équipe de la paroisse Notre- Dame mais, toujours préoccupé par la pastorale des familles brisées, il crée en 2003 chez notre cher Père Alain Bandelier qui veut bien lui ouvrir les portes de son Foyer, les Ateliers de Combs-la-Ville. Un petit groupe de prêtres, de diacres et de religieux se réunit pour approfondir la pastorale des divorcés remariés. Des intervenants remarquables y participeront : le cardinal Barbarin, le Père Alain Mattheeuws, Mgr Battut etc. Les modérateurs de la Communion ont été et sont toujours invités à participer à ces rencontres. Au début Jacques venait, mais l’âge et sa santé ne lui ont plus permis de se déplacer. Ce sont « ses fils » spirituels : Gérard Berliet et Éric Jacquinet qui animent désormais ces rencontres annuelles. Tous deux ont parfaitement saisi le charisme du Père Jacques. Ils continuent son œuvre.

Rendons grâce pour cette longue vie offerte sans cesse à tous les blessés de l’amour. Le Père Jacques veille sur nous tous.

Philippe (Rueil Malmaison) – ILE-DE-FRANCE (Poissy)