Trois conversations vécues avec des amis chrétiens durant ce mois de décembre m’ont fait m’interroger sur ce terme.
Au début du mois, Anne, une amie, m’explique qu’elle a décidé de rompre définitivement avec ses parents qui « lui bouffent la vie ». Ça suffit, elle va cesser de les voir et s’apprête à leur en faire part. Elle se pose simplement la question : de vive voix ou par écrit ?
Personnellement, connaissant ses parents et l’histoire familiale, je suis atterrée. J’écoute, j’écoute, je me retiens d’intervenir mais au bout d’un moment, je me risque : « tu ne penses pas que tu pourrais laisser passer les fêtes pour mûrir un peu ta décision ? »
Réponse immédiate : « Oh, non, j’ai bien réfléchi et je suis parfaitement en paix avec cette décision… »
Quelques jours plus tard, Henri, père de famille divorcé depuis quelques années et souffrant beaucoup de la solitude, m’appelle pour m’annoncer son mariage proche. Je ne savais rien, je suis un peu étonnée. Je lui pose quelques questions au sujet de sa future épouse et j’apprends qu’il s’agit d’une étrangère sans papier résidant pour l’instant sur un autre continent, connue par internet, rencontrée deux fois rapidement, mère de famille, ne parlant pas français (et lui pas sa langue)… Je tremble et j’hésite à m’immiscer mais j’ose un timide : « tu crois vraiment que ce mariage est si urgent ? » et il me répond aussitôt : « oui, j’ai bien réfléchi et je suis dans la paix depuis que je l’ai décidé. »
La semaine avant Noël, je participe à une réunion incluant un partage personnel. Un ami nous parle de sa vie de divorcé-remarié, de l’attitude de l’Eglise envers eux et il ajoute : « nous, on a décidé de communier et on est dans la paix avec ça. »
Je sursaute, « je suis dans la paix » encore ?
Je dois dire que ces mots, prononcés à trois reprises en si peu de temps m’ont mise mal à l’aise. Je ne me sentais aucun droit de juger ces personnes qui ont leur vécu, leur conscience et je n’avais rien à en dire ni à en penser. En même temps, je me suis interrogée sur ce qui me dérangeait dans ces histoires.
J’ai eu l’impression que la réponse que j’avais obtenue, similaire les trois fois : « je suis dans la paix » était comme un point d’orgue mis à la réflexion, une fermeture au dialogue, une preuve d’un discernement bien conduit sur lequel il n’y avait plus lieu de revenir. Et pourtant, dans un cas au moins, on pouvait émettre de sérieux doutes sur la valeur du discernement. Alors, où est le problème ?