TEMOIGNAGE
Aimer et pardonner jusqu'au bout
Peu de temps après la disparition de son époux dont elle était séparée depuis de très nombreuses années, Jeanine partage avec les autres membres de la Communion Notre-Dame de l'Alliance comment elle a aimé et pardonné son mari jusqu'au bout. Un témoignage bouleversant.
Bonsoir, mes chers frères et sœurs,
J’ai attendu avec impatience ce moment pour partager avec vous mon vécu du décès de mon mari Karel.
On a déjà entendu de beaux témoignages ce soir et dans le passé, qui nous encouragent à persévérer sur notre beau chemin de pardon et de réconciliation. Désolée, mais moi je ne peux pas vous faire part d’une belle histoire.
Une séparation douloureuse, des relations conflictuelles
J’ai rejoint la Communion en 2000 mais, à cette époque, Karel et moi étions déjà divorcés depuis 15 ans.
Je n’avais que 33 ans quand je me suis retrouvée seule avec deux petits enfants après huit ans de vie commune avec mon mari. Non pas à cause d’une nouvelle personne, mais pour bien d’autres raisons. Karel aussi est resté seul après notre divorce. Il a bien gardé le contact avec nos enfants - deux fils - mais il s’est surtout occupé de sa carrière professionnelle à l’université, qui apparemment a été considérable. Je l’ai découvert moi-même à ses funérailles... juste pour vous dire !
Il est clair que nous nous sommes revus très rarement, et chacune de ces occasions (fin d’études, remise des diplômes des enfants, funérailles de mes beaux-parents, beaux-frères...) a toujours abouti à un désastre. Il ne supportait pas ma présence, et il ne pouvait pas se retenir de m’humilier chaque fois en présence de tout le monde, ce qui était évidemment très gênant pour les enfants : refuser de me serrer la main, de m’adresser la parole ou de me répondre, ou même me lancer des humiliations à haute voix quand j’avais eu l’audace d’être entrée dans son territoire.
Tout a recommencé avec la naissance de nos petits-enfants et les fêtes des grands- parents à l’école... À chaque fois c’était désastreux et gênant. Bref, j’ai dit que ce ne serait pas une belle histoire...
Attachée de tout mon coeur à la grâce du sacrement du mariage
Et malheureusement son décès non plus n’a pas été une histoire édifiante. J’ai dit qu’il vivait seul, et les trois dernières années après sa retraite et à cause du Covid, il s’est enfermé dans sa grande maison, de peur de l’attraper parce qu’il portait un pacemaker. Au mois de janvier dernier, il est mort subitement de façon tout à fait inattendue. C’est la police qui l’a trouvé quelques jours après, parce qu’il ne répondait pas au téléphone.
Ce fut très choquant et traumatisant pour nos enfants et nos petits-enfants qui n’ont pas pu aller lui dire adieu avant, ni aller le voir après... Ils se sont demandé s’il avait souffert avant de mourir, s’il avait eu peur, s’il avait eu une longue agonie... Heureusement non : grâce au pacemaker, le cardiologue a pu confirmer qu’il est mort d’un arrêt cardiaque dans son sommeil avec la date et l’heure exacte, c’était en pleine nuit. Soulagement pour les enfants : alors il n’avait pas souffert... Mais pas pour moi : alors aucune occasion de conversion ? Ne fut-ce qu’une très petite ? Une atroce souffrance…
Je vous avais dit que ce ne serait pas une belle histoire. Alors pourquoi est-ce que j’ai néanmoins attendu avec impatience de la partager avec vous ce soir, ma chère famille de la Communion Notre-Dame de l’Alliance ? Eh bien, parce que jusqu’ici je n’ai pas encore parlé de Dieu, ni de la grâce du sacrement de mariage à laquelle je m’étais attachée de tout mon cœur. Et sans Dieu et sans la foi, à vue humaine, on ne peut nier que notre mariage a été un échec, pour ne pas dire un cauchemar jusqu’à la fin atroce. Mais non pas pour Dieu ! Lui seul fait que « tout concourt au bien de ceux qui l’aiment ! » Pour eux, Il jette inlassablement des clins d’œil et des fils rouges dans l’invisible. Ceux et celles qui ont lu mon témoignage dans l’Anneau de Feu n° 357 : "Le Soudaen avait une fillette" comprennent. J’en suis émerveillée moi-même sans fin et encore !
Malgré les humiliations, prier sans cesse pour la sanctification de mon conjoint éloigné du Seigneur
Sur le sacrement de mariage. C’est pendant une retraite que j’ai appris que le premier but du mariage chrétien n’est pas de se rendre l’un l’autre heureux, mais bien de se sanctifier mutuellement, ce qui veut dire faire en sorte que l’autre se rapproche de Dieu pour devenir un saint ou une sainte. En tout cas, qu’il ou elle soit sauvé(e) pour l’éternité. Quelle merveille ! Là, j’ai commencé à entrevoir que c’est grâce au fait que mon mari m’a rejetée que je me suis vraiment jetée dans les bras du Seigneur pour la première fois de ma vie. Alors je dois ma conversion et ma sanctification à mon mari, même contre son gré... ! Le Seigneur a su d’avance qu’il aurait besoin de beaucoup d’amour et de pardon pour sauver son âme.
Avec toute la rancœur qu’il me portait, je me suis souvent inquiétée pour lui, afin qu’il ne soit pas perdu pour l’éternité ! Après chaque rencontre, souvent en larmes, j’ai dû longuement supplier le Seigneur pour apaiser mon âme : « Pardonne-lui, Jésus, il ne sait vraiment pas ce qu’il fait... à son âme ! Il ne sait pas ce qu’il fait à son âme... et à ton cœur, Jésus. Il ne sait vraiment pas ce qu’il fait ! » C’était une vraie consolation de savoir que Jésus en souffrait encore davantage, qu’Il était mort pour lui, et pour tous les pauvres pécheurs qui ne comprennent rien à son amour pour eux.
Il y a longtemps que je n’espérais plus de pardon mutuel entre nous ni une réconciliation sur cette Terre, mais au moins que son âme soit sauvée ! Alors, sa mort subite, comment est-ce que je l’ai vécue ? Quand mes deux fils sont venus me voir ensemble pour me faire part du décès de leur papa et les circonstances dans lesquelles ils l’ont appris eux-mêmes, j’ai honte de vous le dire mais, ma première réflexion intérieure fut : « Mince, je ne peux plus aller à la Communion Notre Dame de l'Alliance ! »
Mais quand je me suis de nouveau trouvée seule, j’étais moi-même aussi sous choc. Comment le Seigneur avait-Il pu permettre cela ? Après toutes ces années de prière et de supplication ? Après tous ces « priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort » ? Aucun signe de conversion, de repentir, de pardon, de regret... ? ! Est-ce que le Seigneur n’avait pas entendu mes supplications durant toutes ces années ? N’avait-Il pas partagé toutes mes larmes pour son âme ? Pas de réponse... ! La nuit de la foi.
Deux jours plus tard, une amie m’envoie un texte de Louisa Picaretta, dans lequel Jésus répond aux soucis de Louisa sur le sort éternel de sa sœur qui était morte soudainement sans avoir reçu les derniers sacrements. Jésus dit à Louisa : « Quand une personne meurt soudainement sans aucun avertissement ou préparation, les démons n’ont pas l’occasion de s’y mêler et de provoquer une agonie spirituelle. Alors l’âme se retrouve tout de suite devant Moi, et doit faire son choix définitif pour l’éternité. » Quand j’ai lu cela, je ne pouvais pas douter que mon mari avait fait le bon choix... en larmes bien sûr, et dans le purgatoire je n’en doute pas, avec beaucoup de larmes, mais dans la joie d’être sauvé ! C’est magnifique que le Seigneur se serve de tous moyens terrestres pour nous donner ses grâces, comme nos amitiés ! Merci Seigneur Jésus !
Un autre doute de ma part : le manque de pardon, de repentir dans le cœur de mon mari, et l’accumulation de rancœur vis à vis de moi, qu’en avait fait le Seigneur ? Sans en avoir parlé à personne - c’est incroyable, mais c’est comme cela que j’ai pu constater que le Seigneur était vraiment avec moi et a voulu me consoler - une autre amie m’envoie un texte des écrits de Maria Valtorta : « Si une personne est très blessée, offensée, humiliée par quelqu’un et peut pardonner de tout son cœur, comment est-ce que Moi je peux refuser de lui pardonner toutes ses offenses ? Le pardon donné contribue toujours au salut de l’âme de l’offenseur. » Inutile de dire à quel point j’ai loué le Seigneur pour sa miséricorde, sa consolation, sa présence, son amour pour moi ET pour mon mari.
Encore un petit truc pour terminer. Après son décès, mes enfants ont créé un site internet pour honorer leur père et pour accueillir des condoléances, des souvenirs et des photos de lui. Il y en avait une que j’aimais en particulier, parce que Karel sourit magnifiquement et regarde directement dans l’objectif. Je l’ai mise sur mon téléphone en première page et comme cela, chaque fois que je l’ouvrais, il me regardait… il souriait… à moi... ! Ah cette belle connivence entre nous retrouvée après tant d’années ! Quel bonheur, et surtout quel baume, quelle guérison pour mon âme… ! Encore MERCI Seigneur !
Et maintenant un grand merci à vous, chers frères et sœurs, les anciens comme les nouveaux, pour tout ce qu’on a vécu ensemble toutes ces vingt-deux années ! Je suis honnête si je vous dis qu’avec vous j’ai partagé les moments des plus heureux de toute ma vie... ! Alors très grand MERCI à vous du fond de mon cœur.
Je veux vous retrouver tous directement au ciel ! A DIEU !
Jeanine (Belgique)
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